Donner ses ovocytes, comment ça marche?

Un article originalement publié chez Jollies Magazine / 6 mai 2016

Étudiante lilloise de 19 ans, je raconte aujourd’hui comment j’ai vécu cette procédure qu’est le don d’ovocyte. Injections, douleurs, rendez-vous.. mon expérience et mon ressenti seront à la base de cet écrit, moins journalistique que les autres articles de ce blog.

Commençons par le commencement. Certaines d’entre vous suivent peut-être la série américaine Pretty Little Liars. Dans les derniers épisodes, vous avez sans doute regardé Emily, jouée par Shay Mitchell, se faire voler ses « œufs » par le remplaçant de A. Et oui, je parle bien de cette série pour introduire mon don dans l’article, vu que c’est cet épisode qui m’a poussée à me renseigner sur cette procédure médicale. En effet, après plusieurs essais au don du sang, j’ai abandonné l’idée, à cause d’une tension trop basse ou d’autres raisons diverses. Malgré ce refus, j’étais toujours décidée à aider et à donner de ma personne. En me renseignant sur différents sites, je suis donc tombée sur le don d’ovocytes. Grâce à la nouvelle loi de 2014, toute femme de plus de 18 ans peut désormais donner, et ce, même sans enfant. En effet, avant sa modification, seules les mères pouvaient participer à cette procédure.

Mais l’ovocyte, c’est quoi? Selon le site www.dondovocytes.fr, qui m’a énormément aidée au moment de mes recherches, l’ovocyte est « la cellule reproductrice féminine » contenue dans l’ovaire. Tous les mois, « une dizaine d’ovocytes se développe pour aboutir à l’ovulation d’un seul, pouvant être fécondé par un spermatozoïde. » C’est donc ce dans quoi le spermatozoïde se cache pour permettre l’ovulation. Ce sont ces cellules qui m’ont été prélevées afin de les « transférer » dans une autre femme. Mais mieux vaut laisser la vidéo du site expliquer les étapes du don. https://www.youtube.com/embed/wn_LXC3Dy5I?version=3&rel=1&fs=1&autohide=2&showsearch=0&showinfo=1&iv_load_policy=1&wmode=transparent

Pour faire simple et mettre un peu d’ordre dans ce récit, je vais décrire chaque étape du don, en suivant l’ordre d’apparence de celles-ci dans la vidéo.

  • La mise en route

C’est via le site de l’hôpital lillois Jeanne de Flandre que j’ai pris rendez-vous pour avoir des informations au sujet de ce don. A la suite de ce rendez-vous, qui m’a convaincue de donner, j’ai pris rendez-vous avec l’anesthésiste, une psychologue et la médecin qui me suivait pour commencer les démarches administratives et les tests cliniques. Après des problèmes de dates, d’examens scolaires tombant aux moments des rendez-vous et autres soucis de ma vie désordonnée, j’ai donc pu me faire retirer 9 tubes de sang (afin de faire un caryotype et autres tests que je ne serais pas capable d’expliquer), dû remplir les formulaires de consentement de prélèvement et aussi discuter du don et de cette démarche à une psychologue. Comment ressentais-je le fait que l’enfant qui allait naître grâce à ce don allait avoir mon code génétique  ? Est-ce que ma famille, mon petit ami et mon entourage me soutenaient ? Est-ce que j’avais des questions, des peurs ? (oui, de prendre du poids à cause du traitement, mais rassurez-vous, je n’ai pas pris un gramme, enfin, pas à cause du traitement en tout cas) Est-ce que vous savez que la famille ou l’enfant ne pourront jamais vous retrouver dans nos dossiers ? Autant de questions importantes dont les réponses rassurent les donneuses. Quelques allers retours jusqu’à l’hôpital plus tard, j’étais donc prête à commencer les injections hormonales.

  • Les injections et les contrôles

Après avoir décrété que mon état de santé et mon état mental me permettaient de faire ce don, j’ai dû apprendre à me faire, moi-même des piqûres. Ironie du sort, je DETESTE les piqûres. Avec un traitement précis commencé le 16 et terminé le 27 avril, j’ai surpassé ma peur. (enfin, tout est relatif, j’ai fait un vaccin il y a deux jours et j’ai, encore une fois, failli pleurer…) Les 5 premiers jours, une seule injection à faire, dans mon petit ventre, autour du nombril. Pour être franche, la première fut la pire, et la plus longue. Tremblante, j’ai désinfecté la zone, préparé la seringue (sous forme de stylo pré-rempli très pratique à utiliser) et j’ai avancé ma main jusqu’à mon ventre. Et là, bloquée. Plus moyen de bouger. J’attendais, assise, avec le tshirt remonté que je tenais entre mes dents, le tout en tremblant et avec les larmes aux yeux, que l’injection se fasse toute seule. Parce que le pire, dans l’histoire, c’est de devoir regarder. Eh oui, pas possible de penser à autre chose et de regarder dehors le temps qu’une infirmière me pique, là c’était à moi de le faire. Après plusieurs grandes respirations et plusieurs messages de panique envoyés à des amies, j’ai fini par réussir et planter cette maudite aiguille. Les jours suivants, la peur et le pincement s’atténuaient, jusqu’aux dernières injections, le 27 avril dernier. Toutefois, vous pouvez demander à un infirmier de vous aider pour vos injections, ou encore à un proche. Avec mon emploi du temps et mes révisions, me déplacer tous les jours pour me faire piquer par un professionnel de la santé était trop compliqué et mon petit ami, lui, n’était pas vraiment à l’aise avec l’idée de planter une aiguille dans le ventre de sa copine.

Le traitement se déroule ainsi en 3 étapes d’injection:

Du premier au 6e jour du traitement: une injection d’un premier médicament

Du 6e au 12e jour: une injection du premier médicament accompagnée d’une deuxième piqûre complémentaire

Le 13e et dernier jour: dernière injection deux jours avant la ponction. Cette injection est l’injection du « déclenchement » et permet le détachement des ovocytes deux jours plus tard, jour de la ponction.

Lors du traitement, j’étais surveillée de près par l’hôpital. En effet, j’ai du m’y rendre trois fois avant le déclenchement et mon séjour en hôpital de jour. Les contrôles avaient lieu entre 7 et 8 heures du matin, avant le début des consultations. A trois reprises, j’ai donc passé une échographie par voie vaginale et dû aussi faire une prise de sang, pour permettre aux médecins de vérifier le développement de mes ovocytes. Avec 30min de métro aller-retour, les réveils étaient durs lorsque je devais me rendre à la clinique. Et à la suite des rendez-vous, une infirmière m’appelait dans la journée pour m’indiquer comment poursuivre mon traitement et me donner la date du prochain contrôle.

Cette période de 15 jours était assez éprouvante, surtout à cause des contrôles. Sans parler de l’heure à laquelle les rendez-vous avez lieu, les échographies et les prises de sang à répétition étaient parfois douloureuses et loin d’être agréables. Les injections, quant à elles, ne faisaient pas plus mal qu’un vaccin. Quelques douleurs abdominales se faisaient parfois ressentir, mais rien d’affolant. Dites-vous que ce sont les mêmes douleurs que lorsque vous avez vos règles, rien de plus. Dans ma vie de tous les jours, rien n’avait donc vraiment changé. Avec mon petit ami, j’ai du me protéger avec des préservatifs, la pilule étant arrêtée avant le début du traitement. J’ai pu manger comme je le voulais, faire ce que je voulais, du moment que les injections se faisaient tous les jours après 17h. Seule la dernière injection, pour le déclenchement, avait elle un horaire précis donné par une infirmière le jour du dernier contrôle.

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  • La ponction

Le 29 avril, jour de ma ponction, j’ai dû me rendre à l’hôpital à 7 heures du matin, à jeun et lavée de la tête au pieds comme demandé sur la notice que l’équipe médicale m’avait donnée lors du dernier contrôle. Me voilà donc, dans une chambre personnelle, en chemise d’hôpital, attendant qu’une infirmière vienne me poser une perfusion (et oui, une piqûre de plus). L’équipe me conseille de me détendre et de me reposer un peu avant l’intervention en bloc opératoire. A 9h30, je suis emmenée en salle de préparation, toujours dans mon lit avec ma perfusion dans le poignet. Deux infirmières s’occupent de me préparer et de stériliser la zone de ponction (je ne vous fais pas de dessin…). L’équipe, adorable, s’approche de moi pour se présenter et discute tout le long de la préparation. La médecin et l’anesthésiste rentrent les dernières dans la pièce, se présentent, me demandent si tout va bien. Elles m’expliquent ensuite la procédure qui ne dure que 5 à 10min. L’anesthésiste, elle, s’assoit à mes côtés et m’explique qu’elle est sur le point de me « préparer un cocktail » qui me permettra de planer et d’être bien tout le long de la ponction. Masque respiratoire sur le visage, elle injecte le produit et me voilà dans un autre monde. La pièce tourne de plus en plus vite, mais c’est agréable. En discutant avec elle (oui, parce que même en étant totalement shootée, elle me posait plein de questions sur mes études, ma famille et ma vie), j’entendais ma voix en décalé et ne ressentait plus vraiment mon corps. A un moment, j’ai senti une sorte de gros pincement au niveau de mon ventre, et c’est en lâchant un râle digne d’un ours sorti de son hibernation que j’ai prévenu l’anesthésiste que j’avais mal. Une dose de médicaments supplémentaire plus tard, j’étais repartie dans mon manège enchanté où je ne ressentais plus rien.

Retournée dans ma chambre et encore dans le gaz, je somnolais à moitié jusqu’à me sentir mal, une heure plus tard. Gros coup de chaud, vomissements, les anesthésiants se dissipaient (selon une aide-soignante) et mon corps n’appréciait pas vraiment la descente du manège. Mais l’aide-soignante m’injecte un anti-vomitif et mon corps se sent beaucoup mieux. Un petit somme plus tard et je peux profiter de ma super collation composée de deux sandwichs triangle au thon et crudités, un yaourt à la fraise et une banane. Je crois que l’équipe médicale n’avait pas forcément compris que je n’avais rien avalé depuis la veille au soir et que j’avais LEGEREMENT faim. La médecin gérant mon dossier, qui m’avait accompagnée dans les démarches administratives lors des premiers rendez-vous, est venue dans ma chambre avant ma sortie pour me donner le nombre d’ovocytes prélevés. 10. 10 ovocytes prélevés, 6 pour une receveuse, et 4 pour moi. En effet, le don autorise maintenant la conservation de certains ovocytes « superflus ». Plus tard, si l’envie d’avoir des enfants me prenaient et si je devais avoir recours à une FIV pour procréer, les cellules congelées seraient ainsi à ma disposition, me permettant de ne pas avoir à attendre le don d’une autre femme pour avoir un mioche.

A 14h45, l’heure de ma sortie selon la permission de mes médecins, ma mère est venue me chercher en voiture (un accompagnant doit obligatoirement être avec vous à la sortie de l’hôpital) et j’ai mangé une ENORME salade au chèvre chaud à une brasserie une demi-heure après. Le soir même, malgré quelques douleurs et les conseils des médecins qui me demandaient de rester calme et de manger léger, j’ai enchaîné un restaurant indien et une virée dans les bars lillois jusqu’à 3 heures du matin. Comme  dirait l’autre, quand l’appétit va, tout va. Les douleurs, minimes, me poussaient à marcher lentement en début d’après-midi  et à être délicate lorsque je devais m’asseoir, mais passé 18 heures, les douleurs étaient quasi estompées.

Depuis la ponction, j’ai 10 jours d’un traitement minime (deux médicament à avaler par jour) et je dois également prendre des Doliprane et du Spasfon pour éviter les douleurs. A part ça, je ne ressens absolument aucune douleur, pincement, contraction ou autre symptôme que j’étais censée avoir selon des amis médecins. Je mange normalement et participe aux activités qui me plaisent. Je n’ai toutefois pas encore repris ma pilule, devant attendre la fin des 10 jours de prise de médicament avant de recommencer.

Avec ce don, j’ai appris à repousser certaines de mes peurs et à être responsable. Faire ce don a permis à un couple de créer une famille et bientôt d’avoir un enfant. Ma famille et mon petit ami sont fiers de mon action. Je dois avouer l’être aussi, je ne me pensais pas capable de gérer aussi bien un traitement quotidien comme celui-ci, ou encore d’aller jusqu’au bout de la procédure. Le tout pendant mes partiels à l’université et les vacances de Pâques. J’ai tenu le coup et ce, jusqu’au bout, pour le bonheur d’autres personnes que je ne rencontrerais jamais.

Le site dondovocytes.fr donne de nombreuses informations, avec un côté plus exact et scientifique que cet article, basé uniquement sur mes connaissances de donneuse. N’hésitez pas à commenter cet article si vous avez la moindre question, je serais ravie de vous aider, de vous épauler et de vous conseiller pour ce don.

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